Dans les années 1950 et 1960, lorsque la NASA en était à ses débuts et qu’elle recrutait ses premiers astronautes, elle les cherchait surtout parmi les pilotes de l’armée. Puisque ces courageux explorateurs de l’espace allaient devoir piloter des engins spatiaux, aussi bien en choisir qui savaient déjà piloter. Logique!
Mais on s’est rapidement aperçu que le fait de savoir piloter des avions de chasse n’apportait aucun avantage aux astronautes, car ils devaient quand même tout apprendre de zéro. C’est que le comportement d’un vaisseau en orbite dans l’espace est complètement différent de celui d’un avion qui vole dans l’air. C’est même carrément le monde à l’envers: pour ralentir, il faut accélérer et pour accélérer, il faut ralentir!
Pour bien comprendre cette bizarrerie, il faut faire la distinction entre la vitesse linéaire et la vitesse angulaire. La vitesse linéaire, tu la connais déjà, c’est la vitesse qu’on peut calculer lorsqu’on voyage d’un point A à un point B. Par exemple, 100 km/h. La vitesse angulaire est un concept qui s’applique aux objets qui voyagent sur une trajectoire circulaire. Ce n’est plus la distance parcourue par unité de temps, mais la proportion du cercle parcourue par unité de temps. On pourrait par exemple parler d’un tour à l’heure, ou de 1/100e de tour à l’heure. Dans un mouvement circulaire, pour calculer une vitesse linéaire à partir d’une vitesse angulaire (et inversement), il faut connaitre la distance entre l’objet en mouvement et le centre du cercle (le rayon).
OK. Imagine deux vaisseaux spatiaux qui filent en orbite autour de la Terre, l’un à 1000 km d’altitude et l’autre à 1001 km d’altitude. Pour qu’ils restent parfaitement alignés l’un au-dessus de l’autre (vitesses angulaires égales), celui du haut doit aller légèrement plus vite puisque la distance qu’il doit parcourir est un peu plus grande que celle du vaisseau du bas (vitesses linéaires différentes).
Imagine maintenant que le vaisseau du bas allume ses réacteurs pour aller plus vite. Sa plus grande vitesse linéaire lui permettra de se libérer un peu plus de l’attraction terrestre et le fera monter sur une orbite supérieure. Mais comme cette orbite est plus grande, sa vitesse angulaire va diminuer et il va se retrouver derrière le vaisseau du dessus… Il aura donc ralenti, malgré son accélération initiale!
Même chose si c’est le vaisseau du dessus qui met les freins: sa vitesse linéaire va diminuer, il va « retomber » un peu vers la Terre et atteindre une orbite plus basse. Mais comme cette orbite est plus petite, sa vitesse angulaire va augmenter et il va dépasser le vaisseau du dessous.
Pas trop intuitif, n’est-ce pas? Les astronautes qui doivent manoeuvrer des engins spatiaux dans l’espace doivent penser de manière complètement différente. Imagine maintenant quand il faut arrimer précisément ensemble deux vaisseaux qui se rejoignent sur une orbite…